Les amitiés enfantines ou adolescentes ne sont pas à prendre à la légère, tant elles comptent dans le développement affectif. Reste à savoir quand et comment intervenir en tant que parents.

Qui dire rentrée scolaire, dit aussi retrouvailles entre copains pour certains et nouvelles rencontres pour d’autres. Une étape pas toujours facile à vivre dans la vie d’un enfant.

Doit-on intervenir lors de disputes de cour de récré ?                            Témoignages et conseils de Laura Gélin, psychanalyste.

« Les amitiés enfantines sont fondatrices. Elles sont le terreau du développement social d’un individu », souligne Laura Gélin. D’où la nécessité, pour la psychanalyste, d’encourager ces relations et de n’intervenir qu’en cas de « vrai problème. Il sera toujours plus productif de donner des clés à son enfant pour lui apprendre à gérer lui-même ses conflits et relations avec autrui plutôt que d’agir ou de parler à sa place. Donc s’il n’est pas en danger, on le laisse expérimenter. » 

Autrement dit, tout ce qui relève des chamailleries de la cour de récréation reste dans l’enceinte de la cour de récréation. Cela n’empêche évidemment pas les parents d’écouter les récits qu’en fait l’enfant. Cela dit :

« parfois, il faut pouvoir lire entre les lignes », témoigne Karine, mère de Zoé, 9 ans. « Depuis la rentrée, Zoé me parlait beaucoup d’une petite fille et de leurs disputes. J’ai d’abord pensé que c’était des histoires de gamines et que je n’avais pas à m’en mêler. Mais à force d’entendre toujours le même prénom revenir, j’ai senti qu’il se passait peut-être autre chose, que ce qui semblait devenir une obsession méritait que je m’y intéresse. » 

Karine décide alors d’aller voir l’institutrice de sa fille et de lui en toucher un mot discrètement, histoire qu’elle jette un oeil pendant les récréations. Il s’est avéré que cette petite fille était en effet assez violente avec Zoé, dès que les surveillants avaient le dos tourné. Le fait que l’enseignante intervienne a réglé le problème.

« Les adultes s’adressent aux adultes et les enfants aux enfants »

 

 

Le réflexe consistant à aller voir en premier lieu l’enseignant me semble être le bon, commente Laura Gélin. Il vaut souvent mieux faire appel à une tierce personne qui ne soit pas émotionnellement impliquée avant de convoquer les parents de l’ami(e). » Autre règle d’or énoncée par la psychanalyste: « Les adultes s’adressent aux adultes et les enfants aux enfants. » Interpeller directement le petit garçon qui a ennuyé le vôtre ou qui refuse d’être son ami n’est pas conseillé. Mieux vaut, si vous souhaitez vraiment vous en mêler, vous adresser à l’un de ses parents.

Mais généralement, hors signaux criants de harcèlement -enfant qui ne veut plus aller à l’école, qui pleure de manière exagérée, qui ne mange plus, qui dort mal…- les conflits se résolvent d’eux-mêmes.

« Au départ, j’ai essayé de m’en mêler, en donnant des conseils, témoigne la mère d’Alice, mais j’ai fini par laisser tomber: celle qui était l’ennemie jurée le lundi devenait le lendemain la meilleure amie, et ainsi de suite. Donc désormais, je me contente de hocher la tête quand elle me raconte, en lui disant que ‘ça passera’. »

Si l’enfant se plaint beaucoup d’un ami qui est méchant, on peut aussi tout simplement lui rappeler que l’amitié n’est pas censée faire mal. Et qu’un ami qui passe son temps à essayer de nous nuire, n’est tout bonnement pas un ami.

Quand s’en mêler aggrave les choses

Parfois, intervenir est à double tranchant. Charlotte se souvient avoir « vu rouge » quand l’une des amies de sa fille, alors en primaire, avait organisé un anniversaire en invitant tout le groupe de copines, sauf sa fille. 

« Elle était tellement malheureuse que j’ai fini par envoyer un texto à la maman, en lui demandant s’il y avait une raison à cette exclusion. Elle m’a répondu d’une manière ultra condescendante, en me disant que ce n’était pas dans ses habitudes de se mêler des affaires amicales de sa fille et qu’il était hors de question qu’elle la force à inviter la mienne. »  

Non seulement Charlotte confie s’être sentie « humiliée », mais le bruit a couru dans l’école que elle avait demandé à ce que msa fille soit invitée et ça a été double peine pour elle. Une dure leçon… L’année suivante, la même enfant a finalement invité la fille de Charlotte, qui s’est précipitée chez elle, sans rancune.

« J’ai compris que j’avais complètement sur-interprété cette histoire et que j’avais sans doute projeté mes propres blessures d’enfant. Depuis, je prends garde à ne pas confondre les peines de mes enfants et les miennes. Et je ne culpabilise plus lorsque ma fille refuse d’inviter à son tour certains copains ou copines. Je me dis que la roue tourne. »

Ne pas condamner les « mauvaises fréquentations »

Les choses se compliquent lorsque les petits deviennent des ados. À partir du collège, par définition, un ado veut aller vers ceux qui sont différents de ce qu’il a connu, ou en tous cas ceux que lui déconseillent ses parents. Par conséquent, mieux vaut réfléchir avant de condamner « les mauvaises fréquentations » de ses enfants. Il ne faudrait jamais critiquer le nouvel ami en tant que personne, conseille la psychanalyste. Mieux vaut remettre en question cette ‘mauvaise alliance’. Par exemple, essayer de montrer à son ado que depuis qu’il ou elle s’est rapproché(e) d’untel, ses notes ont dégringolé, qu’ils ont tendance à avoir un comportement ensemble qui n’est pas correct, etc.

« Montre-moi tes amis, je te dirai qui tu es »

On peut là encore aller voir le personnel enseignant et demander à ce que les compères soient séparés en cours. Sachant, qu’une amitié n’a pas pour objet premier « d’avoir une bonne influence« . Certains parents voudraient en effet que leur enfant choisisse des amis qui leur ressemblent ou des bons élèves qui les tirent vers le haut plutôt que le gentil cancre. « Mais l’amitié ce n’est pas ça, et parfois le gentil cancre apporte exactement ce dont l’enfant qui s’en est rapproché avait besoin. Il faut aussi s’interroger sur les raisons qui font que son enfant semble vouloir être ami avec des personnes de ‘mauvaise influence’.

« Avant de rejeter la faute sur les copains, mieux vaut essayer de comprendre ce qui ne va pas, ce qui explique cette volonté de changer de cercle amical, d’aller vers des personnalités borderline. » Toujours en étant, insiste Laura Gélin, vigilant sans être intrusif. « Si l’enfant paraît en danger en raison de ses fréquentations, il faut agir. Mais si cela semble être simplement une phase, alors on observe, de loin. Et surtout, on continue d’échanger et de parler avec son ado. »

 


Par Caroline Franc Desages pour lexpress.fr

 

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Catégories : Parents

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